jeudi 12 juillet 2018

14- La phytothérapie sans moi

Avant de venir au Tibet, je savais que l'un des moines du monastère était un médecin tibétain traditionnel. Je savais qu'il était herboriste et recueillait lui-même les plantes dont il se servait en traitement. Je savais qu'il les faisait sécher avant de les réduire en poudre. Je savais qu'il en trouvait aux alentours plus de cent sur les 2000 que répertorie la médecine tibétaine, qu'il les associait, parfois même par vingt-cinq ! Je savais cela grâce au film tourné sur place par Yoan Martineau, mis en ligne en 2017 :
https://youtu.be/dkgU57-mtJA


Aussi avais-je l'ambition d'accompagner ce moine lors de ses expéditions, prévoyant que juillet serait une période favorable pour l'épanouissement de la flore d'altitude. Mon expérience dans le Pamir tadjik et les Monts Céleste kirghizes m'avait prouvé que le printemps est tardif à cette altitude. Là-bas, c'était les abricots puis le cassis qui m'intéressaient. La médecine préventive passe avant tout par l'équilibre alimentaire !
Je n'ai donc pas perdu de temps pour quémander un poste d'initiation à l'herboristerie tibétaine, prêt à cueillir genoux en terre, où en équilibre sur les dévers fleuris.

Un lieu de cueillette à l'altitude du Mont Blanc.


A votre avis, lequel cueille à 4807 mètres exactement ?


J'ai postulé avec la conviction du néophyte quand me suis trouvé face à face avec mon moine herboriste, mais non face à un autre moine médecin plus avide de récolter...
nos antibiotiques !


J'ai caché mes bras, craignant qu'ils soient un handicap pour être recruté s'il fallait se charger comme un baudet, sans penser que mon souffle pouvait peut-être me disqualifier.
Mais non ! Ma candidature fut retenue... en théorie.
Las ! Il pleuvait tant qu'il n'était plus question de mettre un moine dehors : ils n'auraient pas quitté leurs toits dorés pour un empire.


Puis, le soleil revenu, ce fut le temps du colloque qui les cloîtrait encore et mettait les nonnes sur les sentiers.
J'ai dû me contenter de contempler les bocaux de poudres végétales, qui, une fois abandonnées sur les étagères prennent toutes les nuances d'argile et de poussière. J'avais imaginé des décoctions rose fuchsia, jaune bouton d'or, et bleu myosotis intense. Les pigments en poudre que j'utilise ont plus d'attrait...
I don't care, je suis en bonne santé, même si je suis trop léger au Tibet. L'eau bout à 80° et ne cuit pas les pâtes. Si je pèse moins de 50 kg, c'est que l'atmosphère sur mes épaules est éthérée.

Dans la pharmacie du dispensaire

Seul, j'ai récolté mes propres "extraits naturels", j'ai rapporté un petit pied de myosotis maintenant moribond d'avoir mal supporté la forte pression des bords de mer, et rapporté aussi un pochon de terre, labourée par les picas, pour la petite communauté tibétaine d'Henvic, Finistère.


Je saurai seulement que la médecine tibétaine comporte quatre types de traitements : 
- les conseils alimentaires 
- les conseils de mode de vie
- les pilules, poudres et décoctions à base d'extraits naturels
- les thérapies dites externes

Plus de 2000 extraits naturels répertoriés sont constitués de plantes, de minéraux comme les turquoises, la calcite et le quartz, de substances animales telles que la corne, et les carapaces.

 Les turquoises

Quant aux thérapies externes, ce sont les saignées et les ventouses, l’acupuncture et la moxibustion, les massages, les compresses, et les bains.
Mais une pratique fréquente déconseille de « percer la peau », et n'utilise ni acupuncture ni saignées. 

 

1 commentaire:

  1. A t-il consulté l'ophtalmologiste, ce moine herboriste ? Car ses lunettes ont un petit air vieillot...

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